La Faculté de droit et les droits linguistiques
INTRODUCTION
C’est vraiment un plaisir pour moi d’être ici aujourd’hui. Ça fait du bien de revenir à la Faculté de droit, de revoir plein d’amis, des collègues et je tiens donc à remercier le comité organisateur de l’invitation.
C’est vraiment un plaisir pour moi d’être ici aujourd’hui. Ça fait du bien de revenir à la Faculté de droit, de revoir plein d’amis, des collègues et je tiens donc à remercier le comité organisateur de l’invitation.
Cela dit, je suis très heureux d’être ici avec vous pour rendre hommage à notre collègue Michel Doucet. On m’a demandé de parler de Michel et de la Faculté de droit dans le contexte des droits linguistiques. Or, à ce sujet, la première chose qui m’est venue à l’esprit est à quel point Michel symbolise, à mes yeux, la mission sociolinguistique de la Faculté. Ainsi, tout en étant conscient qu’il y a également Michel Bastarache, Pierre Foucher et moi-même qui ont travaillé dans le domaine des droits linguistiques à la Faculté, il n’y en a pas beaucoup d’autres que Michel qui, dans cette institution, ont consacré 34 ans aux droits linguistiques. Par conséquent, lorsqu’on pense à la mission sociolinguistique de la Faculté, à mon avis, Michel est la personne qui symbolise le mieux cette mission sociolinguistique.
À cet égard, j’ai décidé de commencer ma présentation en vous lisant le texte officiel des documents de la Faculté :
La faculté de droit a été fondée en 1978 pour répondre à un besoin pressant, celui d’assurer aux francophones du Canada une formation en common law entièrement en langue française1.
Lorsque nous avons entrepris de créer à Moncton une Faculté de droit, notre objectif était essentiellement de nature sociolinguistique. À notre sens, les conditions d’admissibilité aux études juridiques ne favorisaient pas les francophones hors Québec, leurs possibilités de réussite n’étaient pas égales à celles des anglophones et il leur était impossible d’influencer l’orientation de leur programme d’études de droit. Cette situation entraînait une sous-représentation des francophones hors Québec au sein de la profession juridique et une acculturation rapide des juristes francophones, largement influencés par une culture juridique étrangère et souvent incapables de donner un service de qualité dans leur langue maternelle. Ce résultat expliquait en grande partie le maintien d’un appareil judiciaire unilingue anglais. Nous nous devions alors d’offrir aux collectivités francophones hors Québec la possibilité de disposer de services juridiques en français et, si possible, de mettre sur pied leurs propres réseaux d’hommes et de femmes conscients de la nécessité de travailler à la transformation du système social et de l’ordre judiciaire.2
Lorsque nous avons entrepris de créer à Moncton une Faculté de droit, notre objectif était essentiellement de nature sociolinguistique. À notre sens, les conditions d’admissibilité aux études juridiques ne favorisaient pas les francophones hors Québec, leurs possibilités de réussite n’étaient pas égales à celles des anglophones et il leur était impossible d’influencer l’orientation de leur programme d’études de droit. Cette situation entraînait une sous-représentation des francophones hors Québec au sein de la profession juridique et une acculturation rapide des juristes francophones, largement influencés par une culture juridique étrangère et souvent incapables de donner un service de qualité dans leur langue maternelle. Ce résultat expliquait en grande partie le maintien d’un appareil judiciaire unilingue anglais. Nous nous devions alors d’offrir aux collectivités francophones hors Québec la possibilité de disposer de services juridiques en français et, si possible, de mettre sur pied leurs propres réseaux d’hommes et de femmes conscients de la nécessité de travailler à la transformation du système social et de l’ordre judiciaire.2
Or, comme je le mentionnais plus tôt, il n’y a pas une personne, à mes yeux, qui représente mieux et qui a défendu de façon aussi constante ces prémisses que je viens d’énoncer que notre collègue Michel Doucet. Il est le symbole même de cette mission sociolinguistique qui a influencé et qui, je l’espère, va continuer à influencer la vocation de la Faculté de droit.
En tant que professeurs à l’Université, et afin d’obtenir la permanence et d’être promu dans les rangs professoraux, nous sommes évalués par nos pairs en fonction de trois volets : l’enseignement, la recherche et les services à la collectivité. Je vais donc m’y intéresser pour apprécier pleinement le rendement de Michel eu égard aux droits linguistiques à la Faculté.
À cet égard, je mentionnerai que Michel est évidemment au summum de sa carrière en tant que professeur titulaire. Cela signifie que, selon le jugement de ses pairs, il a atteint un rendement satisfaisant dans chacun des trois volets que sont l’enseignement, la recherche et les services à la collectivité. Et j’ajouterais que, me considérant toujours un de ses pairs, je peux d’ores et déjà vous dire que mon analyse mène à conclure à un rendement plus que satisfaisant. En fait, le rayonnement de ce professeur titulaire dans les trois volets que j’ai mentionnés est vraiment exceptionnel!
En tant que professeurs à l’Université, et afin d’obtenir la permanence et d’être promu dans les rangs professoraux, nous sommes évalués par nos pairs en fonction de trois volets : l’enseignement, la recherche et les services à la collectivité. Je vais donc m’y intéresser pour apprécier pleinement le rendement de Michel eu égard aux droits linguistiques à la Faculté.
À cet égard, je mentionnerai que Michel est évidemment au summum de sa carrière en tant que professeur titulaire. Cela signifie que, selon le jugement de ses pairs, il a atteint un rendement satisfaisant dans chacun des trois volets que sont l’enseignement, la recherche et les services à la collectivité. Et j’ajouterais que, me considérant toujours un de ses pairs, je peux d’ores et déjà vous dire que mon analyse mène à conclure à un rendement plus que satisfaisant. En fait, le rayonnement de ce professeur titulaire dans les trois volets que j’ai mentionnés est vraiment exceptionnel!
I - L’ENSEIGNEMENT
Il est évident que si je passais tous les éléments relatifs à l’enseignement de Michel au peigne fin, nous serions encore ici dans 3 jours. Je vais donc tenter d’être assez bref.
Michel enseigne à la Faculté depuis 1983. Au cours de ces années, il a évidemment enseigné les droits linguistiques et il a l’avantage d’avoir fait de la recherche action et d’innombrables engagements dans le monde associatif en ce domaine du droit, ce qui a certainement contribué à faire de lui un excellent professeur.
Michel est d’abord et avant tout un enseignant de qualité. Il est un professeur reconnu comme étant un peu sévère, certains diraient un peu dictatorial, mais il le fait parce qu’il veut le bien de ses étudiantes et étudiants. Ce n’est d’ailleurs pas sans raison que, lorsque ces derniers terminent leurs études avec Michel, ils n’ont que des bons mots à dire à son égard. Quand on songe au fait qu’après avoir été soumis pendant 34 ans aux évaluations des étudiantes et des étudiants Michel obtient toujours d’excellentes évaluations, cela nous en dit long sur la qualité de son enseignement.
Cela dit, en plus d’avoir enseigné le cours de droit linguistique, Michel a également enseigné plusieurs cours de common law en français. Il est reconnu par les étudiantes et les étudiants comme un professeur exceptionnel dans le domaine des obligations contractuelles et des domaines connexes comme l’enrichissement sans cause et les recours. Il a su faire bénéficier de son enseignement plusieurs générations d’étudiantes et d’étudiants qui ont pu contribuer par la suite à l’avancement des droits linguistiques au Nouveau-Brunswick, ainsi qu’ailleurs au Canada et dans le monde.
À ce sujet, il y a deux choses que j’aimerais souligner et qui ressortent de son enseignement : 1) comme mentionné précédemment, son enseignement est de qualité, étant un pédagogue extraordinaire comme disent les étudiantes et les étudiants; et 2) son enseignement ne manquait jamais de mettre de l’avant la mission sociolinguistique de la Faculté, et ce, non seulement dans son cours de droit linguistique, mais dans les autres cours, ainsi que dans son quotidien, y compris dans les corridors de la Faculté. Autrement dit, il a toujours mis de l’avant les droits linguistiques, la common law en français et l’importance de bien s’exprimer en français. Ce faisant, cet apprentissage qu’il fournissait à ses étudiantes et étudiants est fondamentale parce que ceux-ci vont ensuite contribuer à la société et s’intégrer à leur profession en étant pleinement conscient de l’importance des droits linguistiques, mais aussi du français en général et du français juridique en particulier dans leur travail.
II – LA RECHERCHE
Pour être un bon professeur et offrir un bon enseignement universitaire, c’est seulement possible à mon avis si on consacre énormément de temps à la recherche. De même, je pense qu’être un bon professeur comme Michel l’a été est seulement possible parce que de gens comme lui font rarement les choses à moitié et ne ménagent jamais leur énergie.
Michel, et c’est tout à son honneur, a produit un nombre incroyable de publications. À ce sujet, il est intéressant de noter que plusieurs professeurs commencent leur carrière avec beaucoup de publications et le nombre diminue au fil des ans. Or, ce qui est fantastique avec Michel, c’est que non seulement il a débuté en étant un bon chercheur, mais au cours des dix dernières années on remarque même une croissance exponentielle de ses publications.
Ainsi, il compte à son actif une vingtaine de chapitres de livres, une cinquantaine d’articles et plusieurs livres dont son plus récent Les droits linguistiques au N.-B. - À la recherche de l’égalité réelle! Si je prends le temps de mentionner le titre de son dernier ouvrage, c’est parce qu’à peu près toutes ses publications traitent de droits linguistiques, sinon elles ont trait au domaine de la common law en français, par exemple dans le domaine des obligations contractuelles. Non seulement ses publications et sa recherche est-elle aussi excellente que son enseignement, mais cette liste ne tient pas compte de ses innombrables communications orales. Que ce soit dans le cadre d’une conférence scientifique ou dans des discours ou autres exercices de vulgarisation, Michel compte plus de 120 communications ayant trait seulement aux droits linguistiques. Quand je parlais tout à l’heure de constance, il est difficile de faire plus et il est difficile de faire mieux.
À cet égard, je me dois de souligner que ses communications orales sont vraiment des communications qui rejoignent tout le monde et se concentrent, personne n’en sera surpris, sur les droits linguistiques. Que ce soit devant le cercle des enseignantes et enseignants de Saint-Louis-de-Kent ou encore devant des élus ou des universitaires à Ottawa, à Fredericton, à Strasbourg, au Pays-de-Galles, à Chiang Mai en Thaïlande et j’en passe, Michel donne des discours scientifiques ou de vulgarisation. Il est constant et il n’y a pas d’auditoire devant lequel il refuse de se présenter. Il est toujours à l’œuvre et cela démontre, encore une fois, à quel point il est le symbole par excellence de la mission sociolinguistique de la Faculté.
Évidemment, Michel étant un être passionné, il est donc passionnant à écouter. Cela était vrai en salle de classe, mais également lors de ses communications orales ici ou ailleurs dans le monde.
III – LES SERVICES À LA COLLECTIVITÉ
Lorsqu’on est un professeur universitaire, il y a deux catégories de services à la collectivité : 1) les services internes à l’université et 2) les services externes. Le curriculum vitae de Michel contient des pages et des pages d’exemples d’implications au sein de ces deux volets. À l’interne, il a été le doyen de la Faculté de droit, le directeur du Centre international de la common law en français, le directeur de l’Observatoire international des droits linguistiques, le président du corps professoral, membre du sénat universitaire et j’en passe. En outre, lorsqu’on devait procéder à l’embauche d’un nouveau membre du corps professoral ou qu’on se réunissait à la Faculté pour discuter du programme d’études, Michel était la personne sur qui on pouvait toujours compter pour nous rappeler la mission de la Faculté. Je ne doute nullement que l’ensemble de mes collègues qui ont eu le plaisir de travailler avec Michel pourront vous confirmer qu’il nous rappelait toujours l’importance de la mission sociolinguistique de la Faculté. Je pense que Michel a toujours eu une préoccupation, voire maintenant un souci en quittant, de s’assurer qu’on allait continuer avec la mission sociolinguistique et avec les droits linguistiques à la Faculté. Ce matin, lorsque j’ai entendu parler et pris connaissance du dossier du nouveau professeur Labelle Eastaugh, j’étais vraiment heureux de voir qu’on avait une jeune relève sur place. Je pense que Michel doit également être très heureux de voir arriver cette relève à la Faculté pour continuer son œuvre.
Au-delà de l’implication de Michel à l’interne, il va sans dire que Michel s’est énormément impliqué à l’externe, notamment avec l’Association des juristes d’expression française (AJEFNB), la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), ainsi que par l’entremise de comités d’experts au pays et à l’international, etc.
Ce qui est intéressant de constater est qu’au cours des dernières décennies, Michel a été de tous les moments forts de l’Acadie du Nouveau-Brunswick en matière de droits linguistiques. Pour s’en convaincre qu’il suffise de penser que, en tant que président de la SANB, il a été un membre important du mouvement 88 en 88, un moment clé qui a mené à l’article 16.1 de la Charte, lequel représente un outil fondamental pour l’égalité linguistique dans la province. De même, il a été l’un des avocats qui a plaidé à la Cour d’appel de la province l’affaire Charlebois c. Moncton qui a mené au Nouveau-Brunswick à une nouvelle Loi sur les langues officielles en 2002.
CONCLUSION
Bref, somme toute, j’espère que vous comprenez mieux pourquoi je disais au début de ma présentation que Michel est la personne qui symbolise le mieux la mission sociolinguistique de la Faculté de droit de l’Université de Moncton. Il en est vraiment le symbole par excellence. Il est le professeur qui a été, au fil des ans, d’une constance inébranlable autant en enseignement des droits linguistiques et de la common law en français qu’en termes de services à la collectivité et de recherche. Il a su, à mes yeux, mieux que quiconque, en 34 ans, symboliser de façon extraordinaire la mission de la Faculté. C’est pourquoi je tenais à être ici aujourd’hui pour lui rendre hommage.
Merci Michel !