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English Montreal School Board c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCS 2682 (CanLII)

Date :
2019-07-08
Numéro de dossier :
500-17-108530-190
Référence :
English Montreal School Board c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCS 2682 (CanLII), <https://canlii.ca/t/j1bl6>, consulté le 2024-03-29

English Montreal School Board c. Procureure générale du Québec

2019 QCCS 2682

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

 

 

N° :

500-17-108530-190

 

 

 

DATE :

LE 8 JUILLET 2019

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DOMINIQUE POULIN, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

ENGLISH MONTREAL SCHOOL BOARD

et

PATRICIA R. LATTANZIO

Parties demanderesses

 

c.

 

PROCUREURE GÉNÉRALE DU QUÉBEC

Partie défenderesse

 

et

 

COMMISSION SCOLAIRE POINTE-DE-L'ÏLE

et

OFFICIER DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE DE LA

CIRCONSCRIPTION DE MONTRÉAL

           Mises-en-cause

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

L’APERÇU

[1]              Les requérantes, Commission scolaire English-Montréal, ci-après appelée « CSEM » et Mme Patricia R. Lattanzio se pourvoient en contrôle judiciaire et demandent à la Cour supérieure de déclarer invalides deux décrets du Gouvernement du Québec  du 26 juin 2019 par lesquels  il est ordonné que la propriété de deux lots avec les bâtisses dessus construites soit transférée de la CSEM à la Commission scolaire de la Pointe-de-l‘Île, ci-après appelée « CSPI »  pour qu’elle y établisse des établissements d’enseignement.

[2]              Le présent jugement statue sur la demande de suspendre, vu l’urgence, les effets des deux décrets de façon provisoire pendant une période de 10 jours.

[3]              Ce jugement ne porte pas sur les autres conclusions de la demande, à savoir la demande de sursis interlocutoire et la demande de déclaration d’invalidité des décrets.

1.            LE CONTEXTE

[4]              Les décrets numéro 670-2019 et 671-2019[1] sont en litige. Ils sont signés par le greffier du conseil exécutif en application de du premier alinéa de l’article 477.1.1 de la Loi sur l’instruction publique (chapitre 1-13.3), ci-après appelée la « Loi »  lequel prévoit que :

«  Sur la recommandation du ministre, le gouvernement peut, s’il estime que l’intérêt public le justifie et afin de favoriser une gestion efficace et efficiente des immeubles des commissions scolaires, ordonner que la propriété d’un immeuble appartenant à une commission scolaire soit transférée à une autre commission scolaire afin qu’elle y établisse un établissement d’enseignement.

Ce transfert prend effet à la date que le gouvernement détermine. »

[5]              Les deux décrets ordonnent que les propriétés soient transférées en date du 1er juillet 2019. À la date à laquelle la demande est déposée et présentée au Tribunal le 2 juillet 2019, le transfert de la propriété est effectif.

[6]              Les décrets font suite à de nombreuses démarches entreprises en toute bonne foi apparente par la CSEM et la CSPI pour trouver une solution à une situation critique de surpopulation et de manque d’espace dans les écoles francophones de la CSPI. La CSEM reconnaît la situation. Elle constate même dans une résolution du 10 avril 2019 que la CSPI subit une augmentation dramatique des inscriptions de sa clientèle jeunesse, qualifiant la situation de grave « dire »  et elle souligne ses efforts pour aider[2].

[7]               Les discussions soutenues entre décembre 2018 et mai 2019 entre les deux commissions scolaires ne donnent malheureusement pas lieu à des ententes et le 8 mai 2019, le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, ci-après appelé le « ministre » écrit à la CSEM. Il indique que la situation de surpopulation prévalant dans la CSPI est telle que près de 3000 élèves n’ont pas de classe pour la prochaine rentrée. Le ministre considère que les solutions proposées sont insuffisantes et vu l’ampleur des besoins et l’urgence, il envisage d'avoir recours à l’article 477.1.1 de la Loi citée ci-dessus pour ordonner le transfert de trois propriétés, l’école Général Vanier, l’école Gerald McShane et l’école secondaire John Paul I Junior.  Il sollicite les observations écrites de la CSEM au plus tard le 10 juin[3].

[8]              Cette demande d’observations est faite en application de l’alinéa 477.1.3 de la Loi qui prévoit qu’avant de faire une recommandation au gouvernement, le ministre doit donner aux commissions scolaires concernées l’occasion de présenter des observations écrites et leur accorder un délai d’au moins 30 jours pour ce faire.

[9]              La CSEM répond par une lettre datée du 9 juin 2019 dans laquelle elle résume les rencontres, discussions et solutions proposées au fil du temps, tant  pour offrir plus de places pour la rentrée scolaire 2019-2020 qu’à plus long terme[4]. Ces solutions visent, entre autres, la location de certains espaces, le transfert d’un terrain vacant, le transfert d’un petit bâtiment scolaire/garderie vacant à Rivière-des-Prairies et principalement la cohabitation des élèves des deux commissions scolaires dans plusieurs écoles. La CSEM réitère sa dernière proposition dans sa lettre, laquelle offre la disponibilité de 89 classes, plus la possibilité de construction de classes modulaires à Rivière-des-Prairies. Plusieurs classes offertes en disponibilité visent la cohabitation de l’immeuble Galileo, un immeuble qui dessert une clientèle aux besoins spécifiques, dont la relocalisation est planifiée. Or, la résolution sur laquelle la CSEM appuie cette proposition fait l’objet d’un pourvoi en contrôle judiciaire devant cette cour dans le dossier 500-17-108427-199.

[10]           Le 10 juin 2019, la CSPI répond elle aussi à la lettre du ministre du 8 mai. Elle confirme la situation telle que décrite par le ministre, elle explique que la proposition de la CSEM d’instaurer une cohabitation ne peut, après analyse, répondre aux besoins de ses élèves et elle explique ses motifs. Elle évoque des difficultés de partage des espaces communs et des complications logistiques et administratives. Elle ajoute que sa mission est d’intégrer des élèves issus de l’immigration et qu’il est essentiel que cette francisation et intégration se fasse dans un milieu francophone. Vu l’urgence d’agir, elle conclut que le transfert d’un nombre limité d’écoles est la solution la plus simple et la plus respectueuse de la capacité de payer des contribuables.

[11]           Par la suite, des discussions se poursuivent les 17 et 19 juin, mais en vain, les solutions intégrant la cohabitation des élèves des deux secteurs n’étant pas acceptables pour la CSPI.

[12]           De nouvelles résolutions sont adoptées par la CSEM les 20 et 26 juin 2019[5] par lesquelles elle cherche à répondre aux préoccupations du ministre. Le 20 juin, on propose de lancer des consultations visant la cohabitation dans de nouvelles écoles, ajoutant 24 classes potentielles et portant le total de classes disponibles pour la CSPI à 113. On propose également une vaste consultation publique visant entre autres la possibilité éventuelle de transférer les trois écoles en question. On retarde aussi le déplacement de certains programmes d’intégration sociale et socioprofessionnelle du centre Galileo.  Le 26 juin, il est résolu qu’un processus de consultation de 30 jours ayant pour but la cohabitation avec la CPSI soit lancé auprès des conseils d’établissement de quatre écoles, cette consultation devant prendre fin le 29 juillet 2019. Il est également résolu de lancer une vaste consultation publique sur la réorganisation scolaire selon un échéancier venant à échéance en janvier 2020.

[13]           Le 26 juin 2019, les deux décrets décrits ci-dessus sont signés, ainsi que le décret 669-2019. Cet autre décret, adopté chronologiquement avant les deux décrets en litige, approuve une directive du ministre concernant la location d’espace par la CSPI. Cette directive prévoit que la CSPI doit : 1- s’assurer de considérer la conclusion d’un bail de location portant sur tout ou partie des immeubles offerts par une autre commission scolaire; 2-informer le ministre des offres qui lui sont faites et exposer les motifs de son refus; 3-veiller à ce que soient organisés dans ces locaux dès l’année 2019-2020 les services éducatifs auxquels ses élèves ont droit.

[14]           En fait, il doit être compris que le transfert des deux écoles n’assure au total que 38 classes supplémentaires à la CPSI et ne règle que partiellement le problème qualifié d’urgent par le ministre.

2.            LES QUESTIONS EN LITIGE

[15]           Les conditions permettant le droit à une demande de sursis sur une base urgente sont-elles satisfaites?

 

 

 

[16]           Lors de l’examen par le Tribunal d’une demande de sursis de l’application d’une loi, d’un règlement ou d’un décret, les critères applicables sont ceux relatifs aux demandes d’injonction en vertu des articles 510 et suivants du Code de procédure civile du Québec[6].

[17]           Ces critères ont récemment été analysés par la Cour d’appel dans la décision  Groupe CRH Canada Inc. c. Beauregard [7]. Le Tribunal identifie les questions en litige en l’espèce selon ces critères, y ajoutant l’urgence pour répondre au caractère provisoire et, de par sa nature, urgent de la demande de la CSEM. Les voici :

1-      L’urgence;

2-      La question sérieuse;

3-      Le préjudice sérieux ou irréparable;

4-      La prépondérance des inconvénients.

3.            L’ANALYSE

3.1   L’urgence

[18]           Pour les motifs ci-dessous, le Tribunal conclut que le critère d’urgence n’est pas satisfait.

[19]           À l’étape provisoire, l’ordonnance de sursis sera considérée comme exceptionnelle et sera émise avec prudence. L’urgence doit être immédiate et le Tribunal doit être satisfait que les droits de la CESM seront irrémédiablement perdus ou affectés sérieusement si on laisse écouler le temps jusqu’à l’audience sur la demande interlocutoire[8].

[20]           La CESM invoque l’urgence en soutenant que les transferts de propriété produiront leurs effets lorsque l’officier public recevra un avis à des fins de publication  conformément à l’article 477.1.5 de la Loi. Elle invoque l’urgence qu’une ordonnance de sursis soit émise pour les dix prochains jours de façon à prévenir cette publication au registre foncier et ainsi éviter qu’elle soit forcée de libérer les lieux dans l’attente d’un jugement interlocutoire.

[21]           Or, l’article 477.1.1 stipule que le transfert de propriété prend effet à la date que le gouvernement détermine. La date déterminée par les décrets en litige est le 1er juillet 2019.

[22]           L’article 477.1.5  ne fait que prévoir que dans le cas d’un transfert de la propriété d’un immeuble résultant de l’application de l’article 477.1.1, un avis doit être donné à l’officier de la publicité des droits relatant les faits constitutifs du transfert et contenant une description de l’immeuble concerné.

[23]           Cette disposition ne retarde pas l’effet du transfert de la propriété. D’ailleurs, l’article 2941 du Code civil du Québec  prévoit expressément que la publicité des droits les rend opposables aux tiers, mais qu’entre les parties, les droits produisent leurs effets sans publication, à moins qu’une disposition expresse de la loi ne prévoie autrement.

[24]           Ainsi, la situation est telle que depuis le 1er juillet 2019, la CSPI s’est vue transférer la propriété des deux immeubles. De même, en vertu de l’article 477.1.4 de la Loi, les actes d’établissement qui mettaient les deux écoles à la disposition de la  CSEM[9] ont cessé d’avoir effet le 30 juin 2019.

[25]           Deux étapes ordonnées par le décret n’ont pas encore été accomplies, soit l’avis à donner à l’officier de la publicité des droits  et le versement par le ministre des contreparties de 1 397 230$ et de 2 044 255 $ prévues par les décrets. Le sursis demandé, tel que formulé, ne pourrait viser que ces dernières étapes, celle du transfert de propriété ayant déjà produit ses effets. 

[26]           Le Tribunal note par ailleurs qu’aucune conclusion ne cherche à restreindre la CPSI dans l’exercice des droits qui lui ont été attribués par le transfert de la propriété des immeubles.

[27]            Pour ces raisons, le Tribunal doute que la demande de sursis telle que formulée ait les effets juridiques recherchés par la CSEM. Cette question a été soulevée d’emblée par le Tribunal lors de l’audience et les procureurs n’ont eu que peu de temps pour y répondre. Elle pourra être analysée plus en profondeur au stade de la demande interlocutoire. À ce stade, il n’est pas nécessaire d’en décider parce que pour d’autres motifs, le Tribunal conclut que l’urgence n’est pas démontrée.

[28]           En effet, les allégations de la CSEM et la preuve au soutien n’établissent pas l’urgence d’émettre une ordonnance de sursis provisoire devant prévaloir pour les dix prochains jours. Rien ne démontre que la CSPI a entrepris des démarches qui seraient susceptibles d’occasionner de façon imminente des dommages sérieux à la CESM ou d’affecter sérieusement ses droits, empêchant qu’on attende l’audience sur la demande interlocutoire. À cet égard, la CESM allègue qu’il y a entente entre les directeurs des deux commissions scolaires selon laquelle une période de transition est nécessaire et qu’ils ont convenu de se rencontrer pour organiser cette transition. Cette allégation est supportée par la déclaration assermentée de la directrice générale de la CSEM.

[29]            Il est vrai que la CSPI invoque dans la déclaration assermentée de son directeur général avoir minimalement besoin de la période estivale pour réaliser les travaux de déménagement et l’organisation administrative. La CSEM, sous le serment de sa directrice générale, prétend pour sa part que les deux immeubles sont en excellente condition et qu’une occupation immédiate par la CSPI n’est pas nécessaire pour lui permettre d’accommoder ses élèves pour la rentrée.

[30]           Vu cette preuve et les discussions amorcées  entre les deux commissions scolaires, le Tribunal conclut que le critère d’urgence n’est pas satisfait.

3.2   La question sérieuse

[31]           Comme l’enseigne la Cour d’appel[10], l’évaluation de ce critère repose sur une analyse préliminaire du fond du litige sans une détermination des questions de façon approfondie. L’analyse préliminaire doit établir qu’il existe une question sérieuse à faire trancher par le Tribunal sur le fond, au procès. Une demande qui n’est ni frivole ni vexatoire permettra généralement  de satisfaire les exigences. Il en va de même pour les demandes reposant sur des droits constitutionnels[11].

[32]           Les arguments de la CSEM se fondent sur l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, lequel prévoit ce qui suit :

         «  Langue d’instruction

               23(1) Les citoyens canadiens : 

            a)…

b)   Qui ont reçu leur instruction, au niveau primaire, en français ou en anglais au Canada et qui résident dans une province où la langue dans laquelle ils ont reçu cette instruction est celle de la minorité francophone ou anglophone de la province,

               ont, dans l’un ou l’autre cas, le droit d’y faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans cette langue.

Continuité d’emploi de la langue d’instruction

23(2) Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit son instruction, au niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au Canada ont le droit de faire instruire tous leurs enfants, au niveau primaire et secondaire, dans la langue de cette instruction.

Justification par le nombre

23(3) Le droit reconnu aux citoyens canadiens par les paragraphes (1) et (2) de faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaires, dans la langue de la minorité francophone ou anglophone d’une province :

a)  

b)   Comprend, lorsque le nombre de ces enfants le justifie, le droit de les faire instruire dans des établissements d’enseignement de la minorité linguistique financés sur les fonds publics. » 

[33]           Plus précisément, la CSEM soutient, en se fondant sur des principes reconnus par la Cour suprême du Canada, entre autres dans l’arrêt Mahe c. Alberta[12], que l’objet global de l’article 23 est de préserver et de promouvoir la langue et la culture de la minorité partout au Canada et qu’il est indispensable à cette fin que les parents bénéficient de mesures de gestion et de contrôle sur les établissements d’enseignement pour assurer l’épanouissement de leur langue et culture.

[34]           La CSEM réfère également à une autre décision de la Cour suprême du Canada dans Arsenault-Cameron c. Î.-P.-É.[13] pour invoquer l’existence de trois critères qui doivent être respectés par le gouvernement dans l’exercice de ses pouvoirs discrétionnaires, à savoir le caractère réparateur de l’article 23 de la Charte, les besoins particuliers de la communauté linguistique minoritaire et le droit exclusif des représentants de la communauté de gérer l’enseignement et les établissements d’enseignement de la minorité.

[35]           La CSEM invoque que le gouvernement du Québec a fait défaut de la consulter adéquatement, de considérer son pouvoir de gestion et de contrôle sur ses établissements et de lui accorder la déférence appropriée lors de la prise de ses décisions, contrairement aux protections offertes par l’article 23 de la Charte.

[36]           Sans reprendre les arguments de la CSEM de façon exhaustive, le Tribunal les résume de la façon suivante :

1-   Le ministre n’a pas tenu en compte les impacts de la fermeture de deux écoles dans cette communauté linguistique;

2-   Les propositions de la CESM étaient raisonnables, elles répondaient adéquatement à la crise vécue par la CSPI et de façon plus efficace que le transfert des deux immeubles, de sorte que le ministre n’a pas fait preuve de la déférence appropriée dans les circonstances;

3-   Les positions annoncées par le gouvernement dans le cadre de la période des  discussions ont défavorisé la conclusion d’ententes avec la CSPI;

4-   Le processus de demande d’observations en vertu de l’article  477.1.3 n’a pas été complété dans le respect de ses droits.

[37]           Les faits en litige s’échelonnent sur une longue période, impliquent plusieurs intervenants à différents moments et il n’appartient pas au Tribunal à ce stade préliminaire de déterminer si les faits en l’espèce permettent d’établir si des droits constitutionnels ont été enfreints.

[38]           Comme le soulignait notre cour dans Conseil général de l’environnement c. Québec (Procureur général)[14], les débats portant sur la validité d’actes de l’administration publique dans le cadre desquels des droits fondamentaux sont invoqués satisfont généralement facilement au critère de l’apparence de droit. La Cour suprême du Canada énonçait dans l’arrêt RJR-MacDonald inc. c. Canada (PG)[15] que ce sera davantage au stade du critère de la prépondérance des inconvénients que seront décidées de nombreuses demandes interlocutoires de cette nature, confirmant les exigences minimales peu élevées du critère de la question sérieuse.

[39]            Le Tribunal  conclut en l’espèce que la demande ne semble ni frivole ni vexatoire et que le critère de la question sérieuse est satisfait.

[40]            Le Tribunal retient néanmoins que le recours présente des difficultés. On comprend en effet que les pouvoirs de contrôle et de gestion afférents à la protection des droits accordés par l’article 23 de la Charte visent à assurer son objet premier : maintenir les deux langues officielles du Canada ainsi que les cultures qu’elles représentent et à favoriser l’épanouissement de chacune [16] Or, dans la mesure où l’objet premier de cette protection ne serait pas enfreint par l’effet des décrets, les accrocs aux pouvoirs accessoires, le cas échéant, ne devraient raisonnablement pas donner ouverture à invalider des décisions discrétionnaires prises dans l’intérêt public.

[41]           L’intérêt public des décrets sera plus amplement discuté sous le critère de la prépondérance des inconvénients. Il sera aussi discuté sous ce chapitre de la situation prévalant dans les établissements de la CESM, plus particulièrement de la place suffisante disponible pour relocaliser les élèves des deux écoles transférées. À ce stade du dossier et à la lumière de la preuve soumise, il appert que le droit des enfants concernés de recevoir une éducation en anglais n’est pas compromis par l’effet des décrets.

3.3   Le préjudice sérieux ou irréparable

[42]           Quant à ce critère, la Cour d’appel[17] énonce qu’il faut rechercher si la partie qui requiert le remède, en l’occurrence la demande de sursis provisoire, subirait un préjudice sérieux ou irréparable si sa demande était rejetée.

[43]           Le Tribunal doit ainsi évaluer le préjudice sérieux ou irréparable qui découlerait du refus d’accorder la demande de sursis provisoire et non le préjudice sérieux susceptible de découler de l’application des décrets en litige de façon permanente.

[44]           La question est en effet celle de déterminer si, advenant que la CSEM ait gain de cause au mérite de sa demande de déclarer les décrets invalides, le transfert temporaire des écoles pendant la période du litige lui aura occasionné un préjudice sérieux ou irréparable.

[45]           À ce chapitre, la CESM avance que le transfert des deux écoles à la CSEM, même temporaire, lui occasionnerait un préjudice sérieux et irréparable.

[46]           Le préjudice doit se mesurer en considérant les conséquences découlant de la perte pour la CESM de deux écoles de façon temporaire ainsi que les inconvénients d’avoir à relocaliser ses élèves dans d’autres écoles avoisinantes pendant la période du litige. Est-ce que ce préjudice est sérieux et irréparable?

[47]           Entre autres, les impacts de la relocalisation de 505 élèves sont en jeu.

[48]           Selon les données apparaissant aux annexes D et E de la lettre du 9 juin de la CSEM[18], les 315 élèves de niveau 1 et 2 de l’école secondaire John Paul I pourraient être relocalisés à l’école secondaire Laurier Macdonald, qui est destinée à les accueillir de toute façon pour leurs niveaux 3 à 5. Cette école a une capacité disponible de 433 places. La résolution de la CSEM  du 19 juin 2019[19] laisse comprendre que 9 à 15 classes sont disponibles dans cette école pour la rentrée scolaire 2019 puisqu’on les considère à des fins de cohabitation avec la CSPI.

[49]           Quant aux 190 élèves de l’école General Vanier, ils devraient être relocalisés dans les trois écoles avoisinantes, Pierre-de-Coubertin, Honoré Mercier et Dante qui peuvent accueillir, selon les données, 523 élèves supplémentaires.

[50]           Le Tribunal peut ainsi conclure à la possibilité pour la CSEM de relocaliser les élèves des deux écoles visées par les décrets. Toutefois, le Tribunal n’a pas à sa disposition la preuve lui permettant d’évaluer l’ampleur du préjudice associé à cette relocalisation, ni la possibilité de le réparer à sa juste mesure. Un préjudice existe certainement et sans une preuve plus complète, le Tribunal se garde de minimiser les conséquences d’une telle relocalisation, même temporaire, ainsi que la perte temporaire de ces espaces, aménagés avec probablement beaucoup de soin par et pour cette communauté linguistique.

[51]           Comme la Cour suprême du Canada l’énonce dans l’arrêt RJR-MacDonald inc. c. Canada (PG) [20]: « le terme « irréparable » a trait à la nature du préjudice subi plutôt qu’à son étendue. C’est un préjudice qui ne peut être quantifié du point de vue monétaire ou un préjudice auquel il ne peut être remédié, en général parce qu’une partie ne peut être dédommagée par l’autre ».

[52]           La CSEM prétend que la perte même temporaire de ces écoles, lesquelles représentent des centres communautaires assurant la préservation de la culture de cette communauté, entraînera pour les parents et leurs enfants la dislocation de leur communauté scolaire et un préjudice qui ne pourra être remédié après la détermination au mérite de ce litige.

[53]           Selon ces prétentions, le Tribunal doit retenir que le critère du préjudice sérieux ou irréparable est satisfait.

[54]           Toutefois, le Tribunal conclut, au chapitre du critère de la prépondérance des inconvénients, que la CSPI subirait un préjudice plus important si la demande de la CSEM était accordée et qu’il est également dans l’intérêt public que cette demande soit refusée.

3.4   La prépondérance des inconvénients

[55]      Selon les enseignements de la Cour d’appel[21], le Tribunal doit déterminer, dans son appréciation de ce critère, laquelle des deux commissions scolaires subira le plus grand préjudice, selon que la demande provisoire sera accordée ou refusée, dans l’attente d’un jugement sur la demande interlocutoire.

[56]      Compte tenu de la nature du dossier, il est compris que le refus de la demande provisoire est susceptible d’avoir pour effet que des démarches seront possiblement  entreprises par les deux commissions scolaires en vue de la rentrée 2019-2020,  avant le jugement de cette cour sur la demande interlocutoire.

[57]      Il est donc nécessaire à ce stade d’examiner la situation prévalant dans les deux commissions scolaires de façon à déterminer laquelle subirait le plus grand préjudice de ne pouvoir occuper les deux écoles à compter de la rentrée en septembre.

3.4.1      La situation prévalant dans la CSPI

[58]            Selon la déclaration assermentée de son directeur général, il appert que la CSPI a connu une augmentation significative de sa clientèle depuis les sept dernières années, soit de 6 728 élèves supplémentaires, dont 3 500 se sont inscrits depuis les 18 derniers mois. Pour l’année scolaire 2019-2020, les données disponibles démontrent un déficit de places-élèves de 156 locaux pour le préscolaire et le primaire. Le nombre grandissant d’élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme amplifie ces besoins, vu le ratio réduit de huit élèves par classe pour cette clientèle. Le déficit est particulièrement problématique dans le quartier Saint-Léonard. Toutes les écoles de ce secteur qui pouvaient être agrandies l’ont été et il n’y a pas de terrain disponible et adéquat pour la construction d’une nouvelle école. La majorité des écoles de la CSPI sont en milieu défavorisé et une importante partie de la clientèle nécessite des classes à ratio réduit et des ressources humaines supplémentaires entraînant un besoin de plus d’espace.

[59]           La CSPI prévoit que les classes qui seront installées à l’école General Vanier seront des classes d’accueil desservant majoritairement une population immigrante nouvellement arrivée. L’école John Paul I accueillera le débordement de l’école St-Exupéry. À cette école, 300 nouveaux élèves sont inscrits pour l’année scolaire 2019-2020. Cette école est déjà en surcapacité avec 2400 élèves.

[60]           Le directeur de la SCPI fait valoir que le surpeuplement des écoles compromet la qualité des services éducatifs fournis aux élèves et leur sécurité, particulièrement au niveau des infrastructures et des espaces de services tels les cafétérias, les aires de repos, les plateaux sportifs, les laboratoires et les bibliothèques.

[61]           Finalement, un élément fort important aux yeux du Tribunal, le manque d’espace retarde la fréquentation et la scolarisation de nouveaux arrivants. Le directeur de la CSPI explique qu’au cours de l’année 2018-2019, la CSPI a reçu 1200 nouveaux arrivants dont plusieurs n’ont pas encore pu être scolarisés.

3.4.2      La situation prévalant dans la CSEM

[62]           Du côté de la CSEM, personne ne prétend à un manque d’espace, ni qu’il serait impossible de relocaliser les élèves à la suite de la fermeture de ces deux écoles.

[63]            En effet, la CSEM compte six écoles de niveau primaire et secondaire dans le quartier Saint-Léonard. Toutes sont sous-occupées.

[64]           Trois écoles primaires du quartier, nommément Pierre-de-Coubertin, Honoré-Mercier et Dante offrent au total 523 places inoccupées. La fermeture de l’école General Vanier nécessiterait la relocalisation de 190 élèves. En termes d’espace, la CSEM a suffisamment de place pour pallier ce transfert.

[65]           Au niveau secondaire, l’école Laurier Macdonald a 433 places disponibles et a donc l’espace nécessaire pour accueillir les 315 élèves des niveaux de secondaires 1 et 2 de l’école John Paul I.

[66]           La CSEM se préoccupe par ailleurs de la vitalité de la communauté étudiante anglophone du quartier Saint-Léonard. Elle explique à cet égard dans sa lettre du 9 juin 2019[22] que les deux écoles représentent pour ses communautés des centres communautaires qui assurent la transmission et la préservation de leur culture et patrimoine et favorise leur épanouissement.

[67]           Pour éviter de perdre des écoles, elle a fait des offres à la CSPI pour localiser ses élèves dans différentes écoles de la CSEM pour la rentrée scolaire 2019-2020.

[68]           Finalement, la CSEM a reçu une demande du ministre afin qu’elle lui indique ses besoins financiers liés au transfert des écoles[23]. Comme il n’était pas possible pour la CSEM d’évaluer les coûts de déménagements et autres frais incidents aux transferts[24], ceux-ci ont été déterminés par les décrets[25]. En contrepartie du transfert, le ministre s’engage à verser une indemnité totalisant 3 441 485 $ pour le transfert des deux écoles. Dans sa lettre aux parents de la CESM, le ministre explique qu’une aide financière substantielle sera versée à la CSEM pour faciliter la transition des enfants, des enseignants et de tout le personnel scolaire susceptibles d’être touchés par sa décision[26].

3.4.3      La comparaison des préjudices

[69]           À ce stade, le Tribunal doit tenir en compte que les alternatives proposées par la CSEM n’ont pas fait l’objet d’ententes et que les mesures adéquates qui y seraient associées ne sont pas en place.

[70]           À cet égard, le sous-ministre adjoint Éric Bergeron explique dans sa déclaration assermentée qu’à la lumière des discussions menées avec les deux commissions scolaires, il en est venu à la conclusion qu’une entente administrative entre les deux organisations n’était pas possible.

[71]           Le Tribunal doit aussi tenir en compte que certaines offres de cohabitation font l’objet d’un processus de consultation et qu’en ce qui concerne le centre Galileo, un litige est en cours devant cette cour. 

[72]           Le Tribunal retient donc que :

i)      À ce stade, il n’y a pas d’alternative en place pour accueillir les élèves de la CPSI du quartier Saint-Léonard qui ont par ailleurs la possibilité d’occuper les 38 classes des deux écoles visées par les décrets en litige à compter de septembre.

ii)   Les élèves de la CSEM qui occupaient ces classes jusqu’en juin dernier pourront  être relocalisés  à l’intérieur d’autres écoles du même quartier;

iii)   La CSEM sera compensée financièrement pour ses besoins financiers liés au transfert;

iv)   La vitalité de la communauté linguistique de la CSEM pourra ultimement être rétablie, du moins pour le futur, suivant le jugement au mérite, le cas échéant.

[73]           Le Tribunal souligne qu’il ne minimise pas les inconvénients associés au déménagement et transfert que devront subir les élèves et le personnel de la CSEM. Mais ces inconvénients sont moindres que ceux exposés par la CSPI.

3.4.4      L’intérêt public et la présomption de validité des décrets

[74]           Le Code de procédure civile du Québec limite grandement le recours à l’injonction contre le gouvernement. L’article 81 stipule que les tribunaux ne peuvent prononcer aucune mesure provisionnelle contre le gouvernement et qu’il peut être fait exception à cette règle s’il est démontré qu’il y a eu défaut ou excès de compétence.

[75]           Les tribunaux peuvent agir en présence d’un décret qui irait à l’encontre de droits protégés par la Charte canadienne des droits et libertés. L’immunité consentie au gouvernement n’est pas efficace en présence d’un défaut ou d’un excès de compétence[27].

[76]           Comme l’exprimait la Cour supérieure dans l’affaire Conseil général de l’environnement de Montréal précitée, «  la question de la balance des inconvénients prend toutefois une importance cruciale, sinon déterminante lorsque l’application d’une loi ou d’un décret du gouvernement doit être mise de côté. C’est alors qu’intervient la notion d’intérêt public dans l’analyse du poids des inconvénients. Cet intérêt public réside dans la présomption de validité des actes et des faits et gestes du gouvernement… »  La Cour supérieure retenait, après une analyse jurisprudentielle approfondie, qu’en l’absence d’une illégalité flagrante ou d’un cas exceptionnel à la face même du dossier, on ne peut conclure que les décrets sont à ce point entachés d’une nullité qu’on puisse en suspendre l’application.

[77]           En l’espèce, les décrets ont été adoptés selon une détermination par le gouvernement que les transferts de propriété des deux écoles étaient dans l’intérêt public[28].

[78]           L’article 477.1.1 de la Loi permet en effet au gouvernement d’ordonner que la propriété d’un immeuble soit transférée d’une commission scolaire à une autre s’il estime que l’intérêt public le justifie.

[79]           Il ne fait nul doute que la Loi vise des objectifs d’intérêt public et que le gouvernement a adopté les décrets en litige en estimant qu’il était dans l’intérêt public de le faire. Le Tribunal n’a pas à se demander si le décret a réellement cet effet et il doit supposer que tel est le cas.[29]

[80]           Il est vrai que dans un débat portant sur la protection de droits fondamentaux protégés par la Charte canadienne des droits et libertés, l’intérêt public peut faire l’objet de la préoccupation des deux parties. Comme l’énonce la Cour suprême du Canada dans l’arrêt RJR-MacDonald précité « L’intérêt public comprend à la fois les intérêts de l’ensemble de la société et les intérêts particuliers de groupe identifiables ». Mais la preuve doit être faite par celui qui invoque les intérêts d’un groupe particulier qu’un préjudice est causé à l’intérêt public et qu’il soit démontré que le redressement demandé présente des avantages pour l’intérêt public[30].

[81]           En l’espèce et à ce stade du dossier, le Tribunal conclut qu’il est dans l’intérêt public que la présomption de validité de décrets, adoptés dans l’intérêt public, soit reconnue et que les inconvénients prépondérants qui résulteraient, pour la CPSI, de la suspension de leur application, soient évités.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[82]           REJETTE la demande provisoire de sursis de l’application des décrets 670-2019 et 671-2019;

[83]           LE TOUT avec les frais de justice. 

 

 

 

__________________________________DOMINIQUE POULIN, j.c.s.

 

Me Mark Power

Me Perri Ravon

Me Giacomo Zucchi

Me Audrey Mayrand

Juristes Power

Procureurs des parties demanderesses

 

Me Samuel Chayer

Me Alexandra Hodder

Bernard, Roy

Procureurs de la partie défenderesse

 

Me Armand Poupart jr.

Poupart et Poupart avocats

Procureurs de la mise-en-cause Commission Scolaire Pointe-de-l'Île

 

Date d’audience :

2 juillet 2019

 


 

TABLE DES MATIÈRES

 

L’APERÇU................................................................................................................................ 2

1.         LE CONTEXTE.............................................................................................................. 2

2.         LES QUESTIONS EN LITIGE...................................................................................... 4

3.         L’ANALYSE.................................................................................................................... 5

3.1      L’urgence.................................................................................................................... 5

3.2      La question sérieuse................................................................................................. 7

3.3      Le préjudice sérieux ou irréparable...................................................................... 10

3.4      La prépondérance des inconvénients................................................................. 12

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :............................................................................... 16

TABLE DES MATIÈRES....................................................................................................... 17

 

 



[1] Pièces P-29 et P-30

[2] Pièce P-9

[3] Pièce P-19 annexe A

[4] Pièce P-19

[5] Pièce P-23 et 25

[6] Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores, 1987 CanLII 79 (CSC), [1987] 1 R.C.S. 110. Voir aussi Deschênes c. Provost, 2007 QCCS 1947; http://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2007/2007qccs1947/2007qccs1947.htmlPlacements Sergakis inc. & al c. Le Procureur général du Québec, 2006 QCCS 5242; Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) c. Québec (PG), 2012 QCCS 2860, conf. par FECQ c. Québec (PG), 2012 QCCA 1311 et Villeneuve c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 2861; Conseil général de l’environnement c. Québec (Procureur général) 2008 QCCS 1041.

[8] Société minière Louvem Inc. c. Aur ressources inc. 1990 CanLII 3829(QC CS); Coalition rurale du Haut-Saint-Laurent c. Meunerie Côté-Paquet inc., B.E. 2002-986 (C.S.); voir aussi 9223-0812 Québec inc. (Condos Le Sommet 2) c. 9245-8678 Québec inc., 2013 QCCS 4116.C. GERVAIS, préc., note 38, p. 68; voir aussi ING Canada inc. c. Robitaille, 2007 QCCS 634, requête pour permission d’en appeler rejetée, 2007 QCCA 544.

[9] Pièces P-1 et P-2.

[10] Groupe CRH Canada Inc. c. Beauregard 2018 QCCA 1063, par 28.

[11] RJR-MacDonald inc. c. Canada (PG) 1994 CanLII 117 (CSC), [1994] 1 R.C.S.311.

[12] [1990] 1 R.C.S.343.

[13] 2000 CSC 1 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 3.

[15] 1994 CanLII 117 (CSC), [1994] 1 R.C.S. 311, p. 342.

[16] Mahe c. Alberta 1990 CanLII 133 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 342, p. 362.

[17] Groupe CRH Canada Inc. c. Beauregard 2018 QCCA 1063, par 30.

[18] Pièce P-19.

[19] Pièce P-25.

[20] 1994 CanLII 117 (CSC), [1994] 1 R.C.S. 311 p.341.

[21] Groupe CRH Canada Inc. c. Beauregard 2018 QCCA 1063, par 34.

[22] Pièce P-4.

[23] Pièce -20.

[24] Pièce P-21.

[25] Pièce P-22.

[26] Pièce P-27.

[27] Céline GERVAIS, L’injonction, 2e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2005, pp. 59-63; voir aussi Sinclair c. Bacon, 1994 CanLII 5326 (QC CA), [1994] R.J.Q. 289 (C.A.); P.G. Québec c. Laurendeau, [1985] C.A. 494 et Borowski c. Canada (Procureur général), 1989 CanLII 123 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 342.

[28] Pièces P-29 et P-30.

[29] RJR-Macdonald inc. c. Canada (PG) 1994 CanLII 117 (CSC), [1994] 1 R.C.S. 311 p. 349.

[30] RJR-Macdonald Inc. c. Canada (PG) 1994 CanLII 117 (CSC), [1994] 1 R.C.S. 311 p.344.