Je suis compté, donc je suis ! Comment un simple changement au recensement canadien améliorerait le sort de la francophonie hors Québec
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Mark C. POWER
|Marc-André Roy
|Justin Dubois
|Jean-Pierre Hachey
|Maxine Vincelette
|Ania Kolodziej
|Jennifer Klinck
30 janvier 2017
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Avocat(e)s, Juristes Power1
Plus tôt cette semaine, Le Devoir faisait état du recul marqué de la population de langue maternelle française projeté par Statistique Canada au Québec et ailleurs au pays. Bien que la perte de vitesse du français comme langue maternelle au Québec soit notable, elle est certainement plus préoccupante à l’extérieur du Québec. Selon les estimations, la proportion d’individus ayant le français comme langue maternelle à l’extérieur du Québec passera de 3,8 % à 2,7 %. Ce phénomène serait en grande partie dû à l’immigration, mais aussi à l’assimilation linguistique, à la faible fécondité et au vieillissement de la population.
L’un des facteurs qui contribuent le plus à cette tendance inquiétante est l’absence d’un réseau adéquat d’écoles francophones à l’extérieur du Québec. Un nombre très important d’enfants éligibles à une éducation en langue française n’a d’autre choix que de fréquenter des écoles anglophones. Or, tous s’entendent pour dire que si les enfants francophones n’ont pas accès à une éducation dans leur langue, il sera beaucoup plus difficile pour eux de la conserver, sans parler d’essayer de la transmettre à la prochaine génération.
Plus tôt cette semaine, Le Devoir faisait état du recul marqué de la population de langue maternelle française projeté par Statistique Canada au Québec et ailleurs au pays. Bien que la perte de vitesse du français comme langue maternelle au Québec soit notable, elle est certainement plus préoccupante à l’extérieur du Québec. Selon les estimations, la proportion d’individus ayant le français comme langue maternelle à l’extérieur du Québec passera de 3,8 % à 2,7 %. Ce phénomène serait en grande partie dû à l’immigration, mais aussi à l’assimilation linguistique, à la faible fécondité et au vieillissement de la population.
L’un des facteurs qui contribuent le plus à cette tendance inquiétante est l’absence d’un réseau adéquat d’écoles francophones à l’extérieur du Québec. Un nombre très important d’enfants éligibles à une éducation en langue française n’a d’autre choix que de fréquenter des écoles anglophones. Or, tous s’entendent pour dire que si les enfants francophones n’ont pas accès à une éducation dans leur langue, il sera beaucoup plus difficile pour eux de la conserver, sans parler d’essayer de la transmettre à la prochaine génération.
Quelle proportion d’enfants éligibles n’est pas inscrite dans des écoles francophones ? On entend souvent (et notamment cette semaine) qu’environ la moitié des enfants éligibles n’y vont pas. La vérité, c’est qu’il pourrait y en avoir deux fois plus. Combien, au juste ? Impossible de le savoir ! Pourquoi ? Parce que le recensement canadien n’a jamais posé les questions nécessaires…
Comment cela est-il possible ? Trois catégories de citoyens canadiens ont le droit de faire instruire leurs enfants en français à l’extérieur du Québec en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (et bien d’autres sont, dans les faits, éligibles) :
1. les parents dont la langue maternelle est le français ;
2. les parents qui ont fait une partie importante de leur scolarité au niveau primaire dans une école de langue française ; et
3. les parents dont l’un des enfants fréquente ou a fréquenté une école de langue française.
La seule question du recensement permettant de déterminer si un parent a le droit d’envoyer ses enfants dans une école de langue française est celle sur la langue maternelle. Aucune question n’est posée sur la langue de scolarité des parents ou de leurs enfants. Ainsi, sur trois catégories de titulaires de droits, une seule est « comptée » par Statistique Canada dans le recensement. Encore là, la formulation de la question sur la langue maternelle décourage les réponses multiples, donc beaucoup d’individus ayant appris plus d’une langue en indiquent une seule.
Le résultat ? De très nombreuses communautés francophones sont privées d’accès à des écoles de langue française à l’extérieur du Québec, car une proportion importante et toujours croissante de leurs membres n’est pas identifiée par le recensement. Si rien n’est fait, cette tendance est condamnée à s’alourdir étant donné le nombre très élevé et grandissant de couples exogames (c’est-à-dire des couples dont seulement un membre est francophone) et du nombre d’enfants qui apprennent le français seulement à la maternelle. Dans ces deux cas, il s’agit d’individus ayant le droit d’inscrire leurs enfants dans des écoles de langue française, mais qui ne sont pas recensés comme tel par Statistique Canada et qui ne peuvent donc pas être pris en compte lorsque vient le temps de prendre des décisions sur l’ouverture de programmes scolaires ou de nouvelles écoles.
Il s’agit d’un problème de taille pour les communautés d’expression française à l’extérieur du Québec, qui doivent constamment lutter pour préserver leur langue et leur culture. Idem pour les nombreux Québécois qui s’installent à l’ouest d’Ottawa, et qui souhaitent que leurs enfants soient instruits en français. Heureusement, la solution est simple, peu coûteuse, et réalisable : Statistique Canada peut et doit modifier le prochain recensement, qui aura lieu en 2021, de manière à ce qu’il pose deux questions additionnelles pour ainsi identifier la totalité des enfants éligibles à recevoir une éducation en langue française.
Il n’est pas trop tard, mais Statistique Canada – qui relève de Navdeep Bains, ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique – doit agir rapidement, car les préparations du recensement ont déjà commencé, et les changements potentiels au questionnaire doivent faire l’objet de tests dès 2018. Il est aussi important que Patrimoine canadien, et sa ministre, Mélanie Joly, fassent preuve de leadership dans ce dossier important pour l’épanouissement des communautés francophones, une question qui relève d’elle en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Imaginez s’il n’était pas possible pour le gouvernement québécois de déterminer le bassin d’élèves habitant un arrondissement de Montréal. Il serait impossible de prévoir le nombre ou la taille des écoles. On crierait au meurtre, et avec raison ! Ce que les francophones hors Québec demandent, c’est un accès à des données leur permettant de prendre des décisions basées sur des faits, comme l’ensemble des décideurs publics. Il est absurde que nous n’ayons pas eu accès à de telles données jusqu’à ce jour, et il est grand temps de remédier à cette situation.
Comment cela est-il possible ? Trois catégories de citoyens canadiens ont le droit de faire instruire leurs enfants en français à l’extérieur du Québec en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (et bien d’autres sont, dans les faits, éligibles) :
1. les parents dont la langue maternelle est le français ;
2. les parents qui ont fait une partie importante de leur scolarité au niveau primaire dans une école de langue française ; et
3. les parents dont l’un des enfants fréquente ou a fréquenté une école de langue française.
La seule question du recensement permettant de déterminer si un parent a le droit d’envoyer ses enfants dans une école de langue française est celle sur la langue maternelle. Aucune question n’est posée sur la langue de scolarité des parents ou de leurs enfants. Ainsi, sur trois catégories de titulaires de droits, une seule est « comptée » par Statistique Canada dans le recensement. Encore là, la formulation de la question sur la langue maternelle décourage les réponses multiples, donc beaucoup d’individus ayant appris plus d’une langue en indiquent une seule.
Le résultat ? De très nombreuses communautés francophones sont privées d’accès à des écoles de langue française à l’extérieur du Québec, car une proportion importante et toujours croissante de leurs membres n’est pas identifiée par le recensement. Si rien n’est fait, cette tendance est condamnée à s’alourdir étant donné le nombre très élevé et grandissant de couples exogames (c’est-à-dire des couples dont seulement un membre est francophone) et du nombre d’enfants qui apprennent le français seulement à la maternelle. Dans ces deux cas, il s’agit d’individus ayant le droit d’inscrire leurs enfants dans des écoles de langue française, mais qui ne sont pas recensés comme tel par Statistique Canada et qui ne peuvent donc pas être pris en compte lorsque vient le temps de prendre des décisions sur l’ouverture de programmes scolaires ou de nouvelles écoles.
Il s’agit d’un problème de taille pour les communautés d’expression française à l’extérieur du Québec, qui doivent constamment lutter pour préserver leur langue et leur culture. Idem pour les nombreux Québécois qui s’installent à l’ouest d’Ottawa, et qui souhaitent que leurs enfants soient instruits en français. Heureusement, la solution est simple, peu coûteuse, et réalisable : Statistique Canada peut et doit modifier le prochain recensement, qui aura lieu en 2021, de manière à ce qu’il pose deux questions additionnelles pour ainsi identifier la totalité des enfants éligibles à recevoir une éducation en langue française.
Il n’est pas trop tard, mais Statistique Canada – qui relève de Navdeep Bains, ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique – doit agir rapidement, car les préparations du recensement ont déjà commencé, et les changements potentiels au questionnaire doivent faire l’objet de tests dès 2018. Il est aussi important que Patrimoine canadien, et sa ministre, Mélanie Joly, fassent preuve de leadership dans ce dossier important pour l’épanouissement des communautés francophones, une question qui relève d’elle en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Imaginez s’il n’était pas possible pour le gouvernement québécois de déterminer le bassin d’élèves habitant un arrondissement de Montréal. Il serait impossible de prévoir le nombre ou la taille des écoles. On crierait au meurtre, et avec raison ! Ce que les francophones hors Québec demandent, c’est un accès à des données leur permettant de prendre des décisions basées sur des faits, comme l’ensemble des décideurs publics. Il est absurde que nous n’ayons pas eu accès à de telles données jusqu’à ce jour, et il est grand temps de remédier à cette situation.
1 Les auteur(e)s sont des avocat(e)s exerçants en droit public, en droit de l’éducation et en droits linguistiques.